Martie Rossignol

Toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants, mais peu d'entre elles s'en souviennent. @crédit + Le Petit Prince ★★★

- Chez Martie, tous les récipients et meubles sont  presque vides : frigidaire, dressing, bar... Inutile de débarquer chez elle à l'improviste pour un apéro si vous n'avez pas apporté le rosé et les chips. Quant au shopping, c'est une activité que Martie n'apprécie pas plus que ça, sans oublier qu'elle n'a clairement pas les moyens de s'acheter de nouveaux vêtements.
- Concernant son style vestimentaire, Martie se contente donc, la plupart du temps, d'un jean, d'un pull et d'une paire de baskets. Quand c'est jour de fête, elle sort sa jolie robe et ses collants pas encore filés, mais pour ça, il faut avoir des amis avec qui faire la fête.
- Martie adore les enfants mais elle ne compte pas fonder une famille. Enfin, pas pour le moment... Sinon, elle aime discuter avec eux, surtout quand il s'agit de parler de Pokemon.
- Martie vit au jour le jour : financièrement, elle n'a pas de quoi se projeter dans le futur. Et ça lui va bien comme ça. De manière générale, elle est incapable de prévoir quelque chose, elle est très nulle pour organiser des événements.
- Les lieux de verdure sont les endroits préférés de Martie. Elle aime s'y promener, pas forcément pour rencontrer des gens, mais pour prendre l'air, trouver des pierres, des graines, observer les insectes.
- Commander une pizza ou aller au fast-food, ce n'est pas dans les habitudes de la jeune femme. Tout d'abord parce qu'elle est végétarienne, et puis aussi parce qu'elle considère la junk food comme la nourriture du diable. Beurk! Elle préfère largement une petite salade improvisée.
- Martie possède une impressionnante collection de consoles de jeux-vidéos. Elle a tout gardé depuis son enfance et ne s'en séparerait pour rien au monde.
- La jeune blonde ne suit pas du tout les actualités. Elle a bien une télévision, mais elle sert essentiellement à jouer aux jeux-vidéos.
- Martie vient d'emménager, elle a quitté le logement familial et elle en est ravie. La cohabitation avec ses parents était peu supportable. Martie découvre donc les joies du ménage, des courses, des factures...
- Et puisqu'on parle de factures. Martie a très peu d'argent. Elle a peu d'ambition, ne compte pas se lancer dans une carrière politique, ni devenir une grande scientifique, encore moins prof. Tondre la pelouse pour les lieux publics municipaux lui convient très bien.
- Martie n'est pas maniaque du rangement. Elle n'aime pas trop recevoir des gens chez elle, car ça signifie qu'elle doit ranger. L'ennui, c'est qu'elle n'a pas d'étagère où ranger ses affaires, donc les cartons s'empilent les uns sur les autres pour créer un meuble artisanal. Autre chose : la déco, ce n'est vraiment pas un don chez Martie. Les murs de son logement sont gris, c'est le papier peint que les anciens habitants avaient posé. Cette tapisserie se décolle par endroits, dans les coins, mais on va dire que ça donne un style...
- Martie est sociable, bienveillante, agréable, mais pas très bavarde. Ses centres d'intérêt, le jardinage et les jeux-vidéos, ne sont pas très souvent partagés par les autres personnes de son âge. Ce n'est pas pour autant qu'elle changera ses goûts. Mais du coup, elle ne cherche pas spécialement à créer des amitiés, ou en tous cas elle n'y parvient pas.
- Au départ, Martie ne s'appelait pas Martie. Elle a changé de nom, car l'original ne lui plaisait pas. Elle n'aimait pas vraiment s'appeler Martine.
- Martie n'a pas le permis de conduire, et donc pas de voiture. Elle fait l'essentiel de ses trajets à pied, en vélo ou même en rollers. Même sous la pluie. Après tout, la pluie, c'est naturel. Et Martie aime tout ce qui est naturel.

Here we go! Tous les matins, c'est un petit réveil représentant un petit plombier moustachu qui réveille Martine. Elle a dû recevoir cet objet en cadeau, à un Noël ou à un anniversaire. Et elle y tient beaucoup. Woohoo! Martine se lève, attrape son réveil, appuie sur la tête de Mario pour le désactiver. Elle enfile un gros pull à l'effigie d'un personnage de manga, brosse ses longs cheveux blonds et glisse une gameboy dans sa poche. Elle ouvre la fenêtre de sa chambre et respire un bon coup l'air du printemps.

Martine sort de sa chambre et parcourt quelques couloirs avant d'arriver dans la cuisine, où elle trouve son petit frère, Alban. La jeune femme ouvre un placard, prend son bol préféré (celui sur lequel est dessiné le Petit Prince) et le remplit de muesli aux fruits.
- Pourquoi tu te lèves aussi tôt? Tu n'étudies même pas, tu ne travailles même pas, lance Alban qui, lui, préfère les céréales industrielles et très grasses.
C'est-à-dire que lui, il étudie dans une grande école de commerce.
- Bonjour Alban, répond Martine avec une pincée de sarcasme. Elle baisse le ton et continue d'une voix plus calme. J'ai quand même des choses à faire, entretenir le potager, préparer une tarte...
- On s'en fout des tartes. Maman est là pour les faire. Toi, tu ne sers qu'à squatter en gros. Tu es vraiment pénible, avec ton potager.
Martine prend son bol et quitte la cuisine pour s'installer dans le salon.
- Si je n'étais pas là pour récolter les fruits et légumes, il n'y aurait rien de bon à manger ici.
Martine n'est pas très proche de son frère, qui a une vision très différente de la vie, par rapport à elle. Il ne supporte pas qu'elle ne fasse pas de grandes études, elle ne supporte pas ses grands airs. Alors elle s'installe sur le canapé pour regarder les dessins animés. Il est tôt, mais les parents sont déjà partis travailler. Le père de Martine travaille dans la banque, sa mère est institutrice.
Un peu plus tard, Alban part à l'université. Depuis l'entrée de la maison, il lance :
- Allez, salut mémère, tu passeras le bonjour à Moustache et Patapouf.
Vexée, Martine attrape un coussin qui traînait sur le canapé et le lance en direction de son frère. Mais il s'écrase minablement sur la porte qu'Alban vient de fermer.
Martine. Elle déteste ce prénom. Elle voudrait en changer, elle sait que c'est possible. Mais ses parents ne veulent pas, car "tu comprends, c'est pour rendre hommage à ta grand-mère". Cette même rengaine qu'elle entend depuis toujours lui sort par les oreilles. Grâce à mamie, elle se prend toutes les blagues que l'on peut faire sur l'héroïne du livres que lisaient les gens de sa génération. "Tu ne changeras pas de prénom. Tu ne changeras pas UNE SEULE LETTRE de ton prénom!"
Une fois la vaisselle lavée, Martine file sous la douche, s'habille et part dans le jardin. Son endroit préféré dans la maison, après sa chambre. Il y a des pommes de terre, des fraises, des poireaux, de la salade, de la rhubarbe. Chaque jour, s'occuper du potager lui prend trois à quatre heures. Mais il faut dire qu'il est parfait, et qu'il y a aussi une dizaine de fleurs différentes à choyer également. Martine respire l'air apaisant du jardin. Si elle avait pu choisir, elle aurait préféré être une fleur. Une fleur, ça n'a pas de prénom, ça n'est pas moqué. En fait, la jeune femme a bien vite quitté l'école car ses camarades s'amusaient, comme son frère, à faire des blagues à propos de son prénom. On la traitait de grand-mère ou on faisait référence aux livres. Dont les titres sont trop souvent parodiés à son goût. Oh, si elle n'avait pas eu Martine comme prénom, tout cela l'aurait probablement fait rire.

***

- C'est bien, ma chérie, de récolter des pommes de terre, mais tu n'as pas envie de faire autre chose, dans la vie?
- Mais maman, pourquoi ferais-je autre chose? Je suis faite pour ça. Pour jardiner.
- Et pour geeker toute la soirée, ajoute Alban depuis l'autre bout du salon.
- Inutile d'en rajouter, Alban, corrige la mère avant de reporter son attention sur sa fille. Martine, il faut que tu sois un jour capable de subvenir à tes propres besoins.
- Est-ce que tu es en train de me demander de quitter la maison ? lance Martine.
- Ce n'est pas ça, j'essaie juste de dire que sans études, sans véritable métier, ça va être très compliqué. Regarde ton frère, il...
- Oui, je sais, mon frère. Il va gagner plein d'argent plus tard. Et tu crois que ça le rendra heureux pour autant? Moi, je suis heureuse avec mon jardin.
Il est très rare de voir Martine s'énerver. C'est peut-être la première fois de sa vie qu'elle s'énerve vraiment, en fait. Car à ce moment-là, elle n'en peut plus que personne ne soit d'accord avec elle, que personne n'accepte de croire en elle.
- Ecoute Martine. Ton père m'a dit que si rien ne changeait, tu devrais partir avant les vacances. Tu ne veux vraiment pas faire d'études?

Tout est dit. Papa n'est pas encore rentré du travail, et quand il rentrera, Martine ne sera plus là. La jeune femme reste un instant figée devant sa mère, avant de se lever du fauteuil et de filer dans sa chambre en silence. Sa mère reste là, impuissante. Elle n'a jamais souhaité que sa famille vole en éclat, et pourtant c'est ce qui est en train de se produire. Mais après tout, c'est vrai, Martine pourrait faire des efforts, non?
Et bien non, elle est comme ça Martine. Elle veut vivre sa vie comme ça.
Quelques instants plus tard, la fille est de retour dans le salon, plusieurs sacs dans les mains. Elle a pris des vêtements, ses jeux-vidéos, ses outils de jardinage et bien évidemment le réveil Mario et la tasse Petit Prince.
- Non, maman, je ne veux vraiment pas faire d'études.

***

Martine arrive à la mairie de Montimpa. Elle a encore tous ses sacs sur les épaules et aux bouts des mains. C'est un peu lourd. Heureusement, elle a trouvé un petit logement pas trop cher. Elle a quelques économies qui lui permettront de payer les premiers mois de loyer. Mais pour l'heure, elle a un autre problème à régler. La demoiselle s'approche de la secrétaire. "Pas une seule lettre", avait dit maman. Lol.
- Bonjour mademoiselle. Je peux vous aider?
- Bonjour. Je voudrais changer de prénom.